Pour les Impromptus Littéraires, la consigne était la suivante:
Mmmm… Il était bon le chocolat de Pâques n’est ce pas ?
Ayayaye ! … Dans quatre mois nous allons peut être nous croiser (sans nous reconnaître) sur une plage au bord de la mer. Mais avant d’envisager de se remettre en maillot de bain, une formalité s’impose : Le régime.
Cette semaine vous raconterez donc une histoire de régime, drôle ou tragique, efficace ou vouée à l’échec, de bananes ou de compte-tours.
Chère Mamie,
J'espère que tout va bien pour toi et que tes petits soucis de santé ne sont plus qu'un mauvais souvenir.
Ici tout va bien, mon nouveau travail est très plaisant et mes collègues très sympas.
Par contre, je n'ai toujours pas d'amoureux… Je crois que je suis trop grosse et la perspective de l'été qui approche m'a fait prendre une résolution. J'ai besoin de pouvoir rentrer plus facilement dans du 38 et pour ça j'aurais besoin de perdre 3 ou 4 kilos.
Je viens vers toi car j'ai déjà vu tes photos de mariage et j'ai toujours été secrètement jalouse de constater comme tu étais devenue cette femme mince et élancée depuis l'époque de ces photos. Je préfère me fier à toi et tes trucs de grand-mère pour ce régime, et me méfier de mes magazines qui sont parfois trop rigoureux dans les méthodes qu'ils préconisent.
Merci d'avance de m'expliquer comment tu avais fait à l'époque, je t'embrasse tendrement.
Ta petite-fille adorée et ses 3 kilos de trop.
Ma chérie,
Je suis ravie que tu te rappelles à mon bon souvenir et que tu me sollicites pour autre chose que de l'argent.
Ta lettre m'emplit de fierté, venir consulter ainsi sa mamie est une preuve d'amour évidente et spontanée. Aussi vais-je essayer de t'être du meilleur conseil possible.
Tu as raison, ma chérie, à l'époque du mariage d'avec ton grand-père, j'étais cette femme gironde aux formes paysannes qui faisaient l'admiration des hommes d'alors et la satisfaction de mon entourage à qui je donnais des kilos de preuves de bonne santé.
Mais la mode, tu sais ce que c'est, toi… En deux ans j'ai perdu une trentaine de kilos superflus et me suis forgée cette silhouette que tu as toujours connue depuis ta naissance.
En premier lieu, je me suis mise au sport. J'ai couru, toujours et encore, tellement couru que mes pieds en étaient parfois écorchés à vif par les ampoules. J'ai griffé mes bras aux branches des arbres des forêts que je parcourais lors d'interminables marches. Le corps a ses raisons que la raison ne connaît pas. Tout n'est qu'histoire de volonté.
A cette discipline sportive s'est couplée une diète des plus drastiques. Sûrement pas aussi drastique que celle exposée dans tes magazines, certes.
La privation, ma petite chérie, et la volonté. C'est tout d'abord la viande qui a été exclue de mes menus. Puis petit à petit, j'ai aussi supprimé les légumes de mon alimentation puis tant d'autres denrées trop riches en glucides ou lipides pour ne garder que l'insipide puis le vide.
Puis j'ai arrêté de courir. Le sport n'était plus compatible avec la nouvelle doctrine qui allait être la mienne pour les mois à venir.
J'ai fait abstinence. De tout, de tout ce qui nourrit un corps et serait susceptible de poser sur ses os autre chose que la peau.
Pour les besoins vitaux, de l'eau, du pain, un peu de féculents de temps en temps. Mais en quantité suffisamment infinitésimales pour que mon estomac s'atrophie et se soumette à ce rationnement. Je mangeais tant et si peu que par la force des choses mon corps a fini par accepter les souffrances infligées par cette diète, au point de s'en faire une toute autre nourriture : celle de l'esprit. La nourriture spirituelle pour seul repas quotidien.
Puis au bout de deux années de ce traitement de plus en plus draconien, la délivrance, j'ai repris goût à la vie mais pas forcément aux aliments. Mon estomac et mon foie ont gardé les stigmates de ce régime et j'ai depuis ce temps conservé cette silhouette filiforme que tu me connais. Comme tu le dis toi-même, "mes soucis de santé ne sont plus qu'un mauvais souvenir"…
Je mesure combien il te faudra faire de sacrifices pour parvenir à ce résultat. Mais tu pourras te renseigner, ce régime a connu ses épreuves et a fait ses preuves; aussi je te garantis le résultat et la perte rapide de ces 3-4 kilos disgracieux qui font ombrage à ton bonheur.
Tiens, j'ai même un slogan que pourraient s'approprier tes magazines de mode:
"Grâce au Régime de Vichy, retrouvez goût à la vie!".
J'espère avoir répondu à tes attentes. N'hésite pas à me solliciter si, par exemple, tu cherches à te débarrasser de ton amoureux. A cela aussi ma méthode s'applique avec la garantie du succès.
Je t'embrasse ma chérie, ton grand-père m'attend : je dois changer l'eau de ses fleurs.
Ta grand-mère.